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Les éditeurs à la recherche d'un modèle économique

Les éditeurs de manuels scolaires veulent-ils vraiment aller vers le numérique ? En parcourant les tarifs pratiqués par les éditeurs de manuels scolaires, on peut se poser la question : veulent-ils vraiment favoriser l'utilisation de supports numériques ?

  • Jugez plutôt : le prix d'un manuel scolaire numérique oscille entre 5€ et 7,50€ par an par élève.
  • En comparaison, le prix d'un manuel papier coute entre 20 et 25€ et est utilisé pendant 6 ans voire davantage. Ce qui ramène le cout annuel à 4€ environ. On peut toujours ergoter sur la précision de ces calculs, mais ce calcul rapide donne un aperçu de cette disparité.

On me rétorquera que les manuels numériques contiennent des vidéos et des pistes audios en plus des contenus classiques textes et photos, et que cela a un cout. Mais est-ce que les élèves ont vraiment le temps de visualiser et écouter ces contenus enrichis en plus d'étudier les contenus plus classiques ? À moins que l'un remplace l'autre ? Apprennent-ils mieux ? Ça n'a pas l'air d'être l'avis du PISA 2015.

Certains éditeurs donnent un code d'accès au contenu enrichi en ligne si vous achetez la version papier. Mais ce code n'est valable qu'un an. L'élève de l'année suivante, ne peut donc pas profiter de cet accès au contenu enrichi en ligne.

D'autres proposent un tarif préférentiel pour la version en ligne si vous avez acheté la version papier. Mais la licence ne dure qu'un an.

Le préalable à ces manuels enrichis est d'avoir un support numérique tel que tablette ou ordinateur. Ce qui représente un investissement supplémentaire. C'est une lapalissade mais il faut le rappeler : l'éducation numérique sera toujours plus couteuse que l'éducation papier.

Pour ne parler que des tablettes, la plupart des manuels numériques disponibles nécessitent l'installation d'une application. L'accès au contenu nécessite la saisie d'un identifiant et d'un mot de passe. Tout cela est complexe. Je ne rentrerai pas dans les détails d'une utilisation au quotidien.

Ces applications nécessitent une version du système Android minimale. Une collectivité qui aura investi dans un modèle de tablette, en général bas de gamme et sans évolution de version d'Android possible, n'a donc pas la certitude de pouvoir accéder aux contenus lorsque ceux-ci monteront en version. Nous sommes là confrontés à l'obsolescence programmée des logiciels et des matériels. Un investissement dans un logiciel ou un matériel est en fait un investissement à court terme. Pas plus de 4 ans ? À comparer avec les manuels papier qui durent 6 ans voire davantage.

À voir le nombre de téléchargements des applications de manuels numériques sur le Google Play Store, quelques milliers, on peut avoir deux visions :

  1. Ce n'est que le tout début de la révolution édumatique, les choses ne pourront que s'améliorer, les éditeurs cherchent encore le bon modèle économique numérique,
  2. Tout cela est bien dérisoire comparé aux 12 millions d'élèves. Vive le papier, mais cela fait déjà beaucoup d'argent dépensé pour une minorité de privilégiés et des résultats mitigés.

Peut-être les chiffres du côté Apple Store sont plus enthousiasmants, mais à vrai dire, j'en doute. En parcourant les commentaires des apps des éditeurs, on note des corrections d'incompatibilités avec les anciens modèles d'iPad, ou des impossibilités d'utiliser des manuels une fois l'application mise à jour.

Bref, comme dit un célèbre humoriste, les éditeurs cherchent, se cherchent mais ne semblent pas encore avoir trouvé le modèle économique du manuel numérique. Affaire à suivre.